sábado, 1 de febrero de 2025

PULSION (éd La Découverte)




Capitalisme et Pulsionnalité de Frédéric Lordon et Sandra Lucbert, publiée aux éditions La Découverte. L'événement, organisé par le Centre National de la Danse, a réuni les auteurs ainsi que Mathieu Bellassen, psychiatre et lanceur d’alerte sur les dérives institutionnelles en psychiatrie. La discussion a abordé la manière dont cet ouvrage interroge la pulsion sous un prisme matérialiste et psychanalytique, tout en proposant une réflexion sur le capitalisme et ses implications affectives et sociales. L’ouvrage s'inscrit dans un effort de réhabilitation de la psychanalyse au sein des sciences sociales et de la pensée critique. L'un des aspects centraux du livre est l'exploration de la pulsion comme force fondamentale du sujet, non pas en tant que postulat essentialiste, mais en tant que dérivation d’une dynamique spinoziste du conatus. L’analyse repose sur la trajectoire d’un personnage conceptuel, Modus, qui illustre comment la pulsion s’organise stratégiquement en fonction des premières interactions avec "la chose près du berceau" – une figure générique représentant les premiers pourvoyeurs de soins. L’ouvrage s’attache ainsi à montrer comment ces premières configurations psychiques influencent les stratégies de persévérance dans le monde social. L’analyse se démarque des interprétations classiques de Freud et Lacan, notamment en rejetant la notion de castration au profit d’une vision plus matérialiste et historique des processus de subjectivation. Dans une partie plus théorique, le livre critique l’approche lacanienne du symbolique, dénonçant la manière dont elle a souvent servi à naturaliser des structures patriarcales sous couvert d’un ordre transcendant. Lordon et Lucbert proposent une alternative à la vision du phallus comme signifiant organisateur du symbolique, en déconstruisant l’arbitraire de cette nomination et en explorant d’autres possibles conceptuels à travers des exercices d’hétérotopie. Ils insistent sur la nécessité de concevoir le symbolique comme un construit politique, soumis à des dynamiques d’hégémonie et de transformation. Cette approche ouvre la voie à une remise en question des ordres institués et à une redéfinition des cadres symboliques selon une temporalité plus longue que celle du politique ordinaire. Enfin, la discussion met en lumière l’impact concret de ces réflexions sur les luttes sociales et politiques contemporaines, notamment celles autour des identités de genre et des formes de subjectivation alternatives. Loin d’être un simple essai conceptuel, Pulsion se veut un outil théorique pour comprendre comment les individus sont pris dans des logiques de domination et comment ils peuvent s’en extraire. L’ouvrage défend une réarticulation du politique et du symbolique en faveur de nouvelles formes de subjectivation, portées par des collectifs capables de contester les normes dominantes et d’en instituer de nouvelles.