Tristan Tzara, fondateur du mouvement Dada, souligne son caractère anarchique et anti-système, né en 1916 au Cabaret Voltaire à Zurich. Ce mouvement, répondant à une révolte contre la guerre, la logique bourgeoise et les conventions artistiques, s’est construit autour d’une rupture totale avec les normes esthétiques et sociales. Tzara précise que Dada ne voulait signifier rien de précis, reflétant une confusion intellectuelle délibérée. En réaction au contexte de guerre et à l’isolement en Suisse, les jeunes artistes exprimaient leur mécontentement par des moyens variés, mêlant destruction et provocation, parfois perçues comme scandaleuses. L’art dadaïste rejetait toute logique conventionnelle. Tzara décrit des œuvres réalisées sans intervention directe, comme les instructions données aux peintres pour créer des tableaux, reflétant une démarche où l’art ne se distingue plus des autres activités humaines. Cette vision englobait une critique radicale de la société et de ses institutions, allant jusqu’à refuser toute implication politique ou morale conventionnelle. Néanmoins, Dada était également une réponse à des préoccupations profondes, comme l’expression de l’individu et de sa liberté créative.
Dada, le surréalisme et les évolutions artistiques
Le surréalisme, né dans le prolongement de Dada, a cherché à structurer une révolte artistique moins anarchique, en se dotant d’une base théorique et philosophique sous l’impulsion d’André Breton. Tzara reconnaît qu’il s’est éloigné de Dada au fil du temps, attiré par la recherche d’une cohérence dans l’explosion poétique et visuelle initiale. Si le surréalisme s’est affirmé comme un mouvement révolutionnaire, il s'est distingué par une approche plus didactique et dialectique, contrastant avec le chaos revendiqué par Dada. Tzara rappelle également l’importance de l’art populaire et du folklore, qu’il considère comme une preuve de la créativité universelle. Il souligne que l’art ne doit pas se limiter à un cadre esthétique mais faire partie intégrante de la vie et des luttes sociales. Cette philosophie a conduit les artistes de son temps à s’engager politiquement, notamment contre le fascisme pendant la guerre d’Espagne, affirmant que l’écrivain et le poète ne peuvent rester étrangers aux réalités sociales.
Héritage et perspectives
Interrogé sur l’avenir, Tzara observe que les mouvements récents, tout en évoquant Dada, se différencient par leur contexte et leurs méthodes. Certaines œuvres actuelles, comme des installations de déchets symbolisant le chaos, reflètent l’angoisse de l’époque, entre désorientation sociale et menace nucléaire. Pour Tzara, ces expressions ne constituent pas une solution artistique mais témoignent d’une réalité tangible et d’un rejet des esthétiques académiques. Enfin, Tzara voit dans ces nouveaux mouvements une continuation de l’esprit critique de Dada, bien que chaque époque réinterprète cette révolte selon ses propres défis. L’évolution artistique, selon lui, reste inscrite dans une lignée cohérente où chaque mouvement, en se construisant contre ses prédécesseurs, enrichit la quête de liberté créative et de transformation sociale.