Romeo Castellucci revient avec La Vita Nuova, une performance immersive qui questionne le théâtre, l’art et la condition humaine. Présentée à la Grande Halle de la Villette dans le cadre du Festival d’Automne à Paris, cette œuvre plonge le spectateur dans un espace clos, un ancien garage transformé en caverne, où résonnent des grondements de révolte et de renaissance. Inspiré par un dépôt Citroën à Bruxelles, Castellucci y transpose une atmosphère chargée de mémoire et de potentiel latent, où des voitures bâchées deviennent des figures énigmatiques, presque totémiques. Le metteur en scène explore ici l’idée d’un théâtre capable de suspendre la réalité et de générer un espace de réflexion pure. La parabole de la voiture renversée, image centrale du spectacle, illustre une révolte poétique : un véhicule retourné dont le moteur tourne encore, créant un monde alternatif où de nouvelles perspectives surgissent. Ce renversement symbolise la possibilité d’une libération, un monde où l’art transforme le banal en quelque chose de digne d’être vécu. Pour Castellucci, le théâtre n’est pas un outil politique direct mais un espace d’interrogation où le spectateur doit activement recomposer son propre récit. La musique, conçue avec Scott Gibbons, joue un rôle clé, sculptant un paysage sonore qui dialogue avec l’espace et amplifie la tension dramatique. Entre cris d’oiseaux et vrombissements mécaniques, le son devient une entité vivante, capable de pénétrer l’intimité du spectateur et d’éveiller une conscience sensorielle immédiate. La Vita Nuova prolonge ainsi la réflexion entamée dans ses mises en scène d’opéras comme Parsifal ou Requiem, interrogeant la disparition, la résurrection et l’expérience collective du sacré. Castellucci façonne un théâtre où l’artisanat, la matière et la mémoire se conjuguent pour révéler une vérité plus profonde : celle d’un monde en perpétuelle transformation.